Laura, malade « invisible » et « invisibilisée »

Par où commencer? 

Je m’appelle Laura et dans un peu plus de un mois j’aurai 32 ans. Je suis maman d’une petite fille âgée de 5 ans et demi. Je suis une personne qui adore voyager, qui aime énormément lire, qui est passionnée de langues étrangères. J’aime tout ce qui touche à l’astrologie et à la photographie, puisque j’ai la chance d’être modèle photo. Tout ça fait parti de mon « quotidien ». 

La maladie

Comment tout a commencée

Adolescente j’ai toujours eu des douleurs lors de mes règles. Les anti-douleurs classiques n’y changeait rien. Alors, je subissais en silence en pensant qu’avoir mal était normal… Je faisais infections urinaires sur infections ; j’avais des kystes aux ovaires mais aucun.e soignant.e n’y a jamais prêté attention. Ironique en y repensant un peu. 

Il y a 12 ans …

Je rencontrais mon conjoint, le père de ma fille. Nous nous sommes rencontrés en colocation. Très vite nous avons été attirés l’un par l’autre. Nous parlions de projets communs. Il voulait être papa « jeune », et moi je voulais être maman. 

À ce moment là, j’avais un implant. Quelques temps après notre rencontre je l’ai fait retirer pour notre « projet bébé ». Toutefois, je n’aurai jamais penser que j’allais vivre un calvaire pendants les 7 prochaines années.

L’enfer

J’ai vécu un ENFER au sens littéral du terme. Je tombe très rapidement enceinte. Mais, quelques jours après un premier test de grossesse positif, je fais une fausse couche… Une sensation horrible, je culpabilise, je me sens mal.

C’est le début des problèmes : je fais 8 fausses couches. À chaques fois je finis aux urgences maternité et à chaques fois ont me sors le même discours: « Madame, faire des fausses couches c’est normal, c’est votre corps qui n’est pas prêt.Vous pourrez réessayer dans quelques mois. »

Je vis extrêmement mal ces propos malveillants. Des années plus tard, je me souviens de chacun d’entres eux. À chaque fois qu’une de mes amies tombait enceinte c’était, pour moi, énormément douloureux. J’avais besoin de donner de l’amour. À ce stade, après mes 8 fausses couches, personne ne nous propose de faire des examens. 

La grossesse

Mon « petit miracle »

Il y a 6 ans, je tombe une nouvelle fois enceinte, et cette fois-ci, la grossesse ira à son terme avec son lot de difficultés. Je donne naissance à une petite fille qui se porte bien. C’est notre petit miracle, notre rayon de soleil. Je passe ses 3 premières années auprès d’elle. Mais très vite je ressens de nouvelles douleurs que je n’avais pas auparavant. Je n’en tiens pas forcément compte et me dis que « tout va bien ». Sauf que, non, tout ne va pas bien.

Retour des douleurs post-accouchement

Mes douleurs de règles sont de plus en plus douloureuses et nombreuses : j’ai des douleurs au niveau de l’estomac et dans mes jambes. Je fais sciatique sur sciatique. Je décide donc de consulter une première fois au CHU de Dijon. Je tombe sur une « spécialiste » de l’endométriose. J’explique ma situation, mes douleurs ainsi que mes symptômes. Je lui dis que je pense avoir de l’endométriose mais, très vite, elle me répond que tout ce que j’ai « n’a rien avoir avec une endométriose ». Que mes douleurs ne sont « rien ». Elle décide tout de même de me prescrire une échographie en 3D.

Le diagnostic

L’échographie 3D

Je passe cet examen avec une personne froide, qui m’examine sans me poser de questions. Elle ne me prévient pas au moment où elle introduit la sonde. Rien, pas un mot de tout l’examen. J’essaie de poser des questions mais la aussi c’est très froid. À la fin de l’examen, je demande ce qu’elle a vu. Elle me répond : « Vous n’avez pas d’endométriose. J’ai vu de l’adénomyose rien de plus. Ça reste superficiel. » 

Violences médicales

Je ressors de l’examen confuse, persuadée que « non il n’y a pas que ça ». Je revois la spécialiste. Elle me parle de mes résultats d’échographie : « C’est juste une adénomyose légère ». J’ai beau lui dire que j’ai de plus en plus de douleurs, elle les nie et me répète que je n’ai pas d’endométriose. Je demande donc s’il est possible me prescrire d’autres examens. Elle me réponds qu’il n’en aura pas d’autres.

La médecin me prescrit une pilule, en me disant que « c’est le seul remède efficace contre l’adénomyose ». Je la refuse. Je demande alors pourquoi il n’est pas possible de faire d’autres examens comme une IRM.

Et là, elle me répond : « Je vous invite à aller avoir ailleurs si vous n’êtes pas satisfaite ! ». Je sors de son bureau en pleurs. Des années plus tard je m’en souviens encore

J’ai écrit au service des droits des patient.e.s, mais leur réponse m’a clairement dégoûtée. Je n’ai jamais eu d’excuses.

L’errance médicale

Après cette mauvaise expérience j’enchaîne les rendez-vous. Un.e soignant.e finit par me prescrire une IRM. Je me dis qu’enfin les choses avancent … Toutefois, c’est de nouveau la galère ! L’IRM ne « montre rien », « aucune trace d’endométriose » d’après le radiologue. Je décide donc d’envoyer tout mes examens sur le site : Deuxième avis.

Trois jours, ça aura pris trois jours pour avoir un retour. J’étais tellement angoissée quand j’ai vu le mail. J’avais peur qu’on me dise une nouvelle fois que je n’avais « rien ». J’ouvre ce mail et plus je lis, plus je ressens un grand soulagement. 

Le diagnostic tombe : endométriose digestive

Depuis maintenant 4 ans, je me balade de médecins en médecins, de « spécialistes » en « spécialistes ». J’ai eu des rendez- vous sur Lyon, puis sur Bordeaux et Besançon. Mes douleurs sont de plus en plus fortes au quotidien. Je ne travaille plus. Faire un simple trajet pour aller chercher ma fille à l’école non loin de chez moi est difficile. 

Mon quotidien

Vie de famille

Je suis en permanence fatiguée. J’ai des douleurs que je n’avais pas auparavant. Je suis mise sous anti-douleurs comme le tramadol ou bien, en cas de grosses douleurs, de la morphine. 

C’est devenu invivable. Je vis avec ma fille et son papa. Cela crée énormément de tensions dans notre couple. Mon conjoint me dit d’arrêter de me servir de cette maladie comme excuse pour ne pas travailler ou pour ne rien faire.

Je me sens de plus en plus mal par moment car je ne me reconnais plus. La fatigue et les douleurs prennent de plus en plus d’ampleur. Mon entourage ne me soutiens pas énormément et me fait culpabiliser parce que pour eux, être malade ne veut pas dire « ne rien faire ». 

J’ai souvent entendue des phrases du style : « Moi aussi je suis malade, j’ai eu si ou bien mais ça ne m’empêche pas de vivre, de faire les choses. » ; « Tu pourrais quand même faire à manger pour ton chéri ou bien faire un effort quand même pour l’aider ». Que des remarques désobligeantes.

Instagram

Une fois, j’ai eu le malheur suite de poster une storie Instragram, dans laquelle j’expliquais ma situation après être aller aux urgences. Une influenceuse de ma ville a eu la « gentillesse » de me dire qu’il fallait que j’arrête de me « plaindre », que clairement « ça n’avait pas sa place sur Instagram et que parler d’endométriose c’était à la mode. ». Donc je n’en parle pratiquement plus.

Épilogue

Je n’aurai jamais imaginé qu’avoir une « maladie invisible » m’impacterai autant physiquement et psychologiquement. Du jour au lendemain ma vie a changée. Elle n’est clairement plus la même.


Un témoignage de Laura, atteinte d’endométriose et d’adénomyose.

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