Chloé et Marie-Élisabeth

Chloé et sa maman témoignent. Regards croisés sur l’endométriose.

Chloé

Le collège

Réglée en 2012, à mes 12 ans, mes douleurs n’ont fait que grandir avec les années.

À 14 ans, mon médecin traitant me met sous pilule, ce qui ne me soulage pas. Ayant beaucoup de symptômes digestifs, on me diagnostique gastro sur gastro sans jamais faire de lien avec mon cycle.

Je finis aux urgences régulièrement à cause de ces douleurs. Je passe des examens : coloscopie, IRM, scanner, échographie … le résultat est le même à chaque fois, il n’y a rien. Un médecin a dit un jour à ma maman qui m’accompagne à chaque rendez-vous : « Votre fille n’a rien, c’est d’ordre psychologique ».

Le lycée

Le lycée est un calvaire. J’ai mal. Terriblement mal. Je ne comprends pas pourquoi le Spafon ne me soulage, comme c’est le cas pour mes copines. La position assise, les jeans serrés (eh oui, la mode!), le rythme scolaire, le bus, le manque de sommeil, les camarades qui se moquent de moi … Je souffre. J’ai mal, mais pas seulement au ventre. Pourtant, on ne m’écoute pas.

Maman est là, heureusement. Maman ne lâche pas et ne lâchera jamais. Maman se bat pour nous deux. Je ne suis pas folle. Elle me le rappelle encore et toujours. Je souffre et elle souffre aussi, d’une autre manière. On s’accroche. Délivrance : le lycée c’est fini.

Malgré tout, avec beaucoup d’absentéisme au lycée, j’obtiens mon Bac en 2018 et réussi à entrer dans l’école de diététique de mon choix.

Les études

Je trouve du travail en parallèle de mes études, je suis caissière dans une grande enseigne de meubles, poste plutôt physique qui me demande beaucoup d’énergie.

Changement de vie, j’apprends l’alimentation, même si dans nos études, on ne parle pas de l’alimentation pour l’endométriose. Je teste, je fais des évictions, je dose, j’échoue et je réussis. Je me maintiens, merci l’alimentation. J’ai moins de symptômes digestifs.

En 2020, après une dizaine de pilules testées sans résultat, je fais une échographie avec un radiologue qui n’y connaît rien en endométriose. Constatant toutefois ma douleur, il ouvre ses livres pour chercher d’éventuelles traces d’adénomyose et/ou endométriose. Il émet un doute et me redirige vers un gynécologue « spécialiste en endométriose ». Il n’en est rien, ce médecin me dit une nouvelle fois que je n’ai rien. Il me change de pilule pour en prendre une en continu. Cela me permettra 10 mois de « pause », les douleurs et les symptômes diminuent un petit peu.

J’obtiens mon diplôme de diététicienne nutritionniste malgré la maladie. C’est un grand soulagement.

Vie professionnelle

Quelques mois plus tard j’ouvre mon cabinet de diététique, je serai donc à mon compte et à mon rythme. Quel soulagement ! En parallèle, je continue mon job de caissière puisque malgré ma motivation, mon entreprise n’est pas rentable.

En 2021, quand la maladie revient, toujours avec ma mère, je pars dans une grande ville, dans un centre endométriose. Je suis très découragée. Je n’en peux plus d’entendre « Vous n’avez rien, c’est dans votre tête ».

Finalement un gynécologue m’écoute … enfin !

Neuf ans après, je suis diagnostiquée d’une adénomyose bien présente, ainsi que d’une endométriose symptomatique. J’essaie plusieurs pilules encore, qui ne fonctionnent toujours pas : effets secondaires sur effets secondaires et des douleurs toujours présentes.

Un an après, j’abandonne mon poste de caissière, je ne tiens plus. Je ne peux plus, mon corps ne veut plus me suivre. Je suis fatiguée. On me réponds « moi aussi ». Cette fatigue chronique m’assomme. Je ne peux plus, et on m’accuse de « ne pas vouloir ».

Mon corps me lâche. Que faire ? Je n’ai plus de salaire fixe. Mon cabinet ne fonctionne pas assez pour en vivre. J’ai des charges car je vie seule maintenant. Je fais une demande à la MDPH. J’ai besoin d’aide. Encore une fois, maman répond présente, m’aide, remplit mon dossier, me fait les courses, un brin de ménage, me porte des plateaux repas. Que fait la MPDH ? Elle m’accuse de ne pas être autonome à 22 ans. Je dois travailler pour gagner plus, me dit un intervenant. Travailler, il est vrai je n’y avais pas pensé !

J’arrête la pilule et suis admise dans un centre de la douleur. On me propose un TENS qui m’aide. Mais, ce n’est pas suffisant. J’essaie d’autres traitements qui ne fonctionnent toujours pas.

La fibromyalgie

Un nouveau diagnostic

En 2023, je suis diagnostiquée d’une fibromyalgie. Les rendez vous continuent pour expliquer mes nombreuses douleurs : pneumologue, urologue, gastroentérologue, algologue, etc.

Actuellement, pour gérer la douleur lors des crises, l’infirmière passe pour me piquer (ketoprofène + acupan). J’utilise également de la CBD, ma bouillotte ; je fais du pilates et du yoga ; j’adapte mon alimentation. Je me rend chez le kinésithérapeute deux fois par semaine, auquel s’ajoutent idéalement (quand l’argent suit) des séances d’ostéopathie et d’acupuncture.

J’ai dû m’adapter. L’endométriose a dicté ma vie professionnelle et personnelle. Mais, elle ne me volera pas mes rêves.

Le 30 juin, je vais courir avec le dossard EndoFrance, une petite course locale avec ma mère et toutes les personnes voulant se joindre à nous. Mon but est de sensibiliser à l’endométriose, et surtout de montrer qu’en s’accrochant, on peut réaliser nos rêves.

Maman est toujours là, après 11 ans de douleurs, de rendez-vous, de questionnements, de remises en question.
Maman a subi les 9 ans d’errances médicales.
Maman souffre lorsqu’on lui dit que sa fille est folle.

Maman est convaincue que j’ai mal.
Maman ne lâche pas, en a ras le bol des médecins qui n’écoutent pas. Maman subit l’endométriose.
Elle, comme de nombreux aidants, toutes pathologies confondues : MERCI.

Marie-Élisabeth, maman de Chloé

Les mots d’une maman aidante

Être aidant, c’est écouter, écouter, et encore écouter le malade. C’est aussi ne pas juger ni émettre un quelconque discrédit sur le ressenti la douleur du patient. Mais c’est aussi prendre la parole pour poser les questions auxquelles le patient n’a pas pensé ; être la mémoire des réponses des professionnels de santé que le patient n’est pas dans la capacité d’enregistrer. C’est aussi, malheureusement, devoir hausser le ton lorsque le médecin, qui n’a aucune formation endométriose, se permet de déclarer que le patient n’a rien, et qu’il peut aller consulter un psy, alors qu’il est incapable de simplement avouer qu’il n’est pas compétent, ou formé en la matière.

C’est également se retenir pour ne pas « emplâtrer » le médecin-paperasse de la MDPH, qui doit remplir ses cases sur son document, et qui se permet des réflexions déplacées, parce que ma fille a 22 ans et que, selon lui, ma fille est une « grande fille qui peut se débrouiller seule, sans sa maman ».

C’est enfin le pseudo psychiatre de la MDPH qui se permet de balancer à un malade qu’il doit aller bosser plus pour gagner plus.

Comment se retenir, dès lors, de ne pas leur retourner le bureau sur la tête !?

Être aidant, c’est être un paravent, un paratonnerre, un sparing-partner, qui encaisse les coups en silence ; un miroir qui renvoie le soleil.

Mais, ma fille, c’est tellement bon pour moi d’être à tes côtés dans ces épreuves que la vie t’inflige !

Courage à tous les malades et à tous les aidants !


Un témoignage de Chloé, atteinte d’adénomyose, d’endométriose et de fibromyalgie, et de sa maman Marie-Élisabeth.

Sororifemme-Endométriose

Fondé en 2023 par Sarah Bekkens, Sororifemme-Endométriose est un lieu ressource virtuel, une boîte à outils pratique et bienveillante pour toutes les personnes atteintes d’endométriose.

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